CONCLUSION : EXTRAIT DE LETTRE
... Encore à l’hôpital à me reposer, mon petit Bobby. J’ai dû avoir une dépression nerveuse. Je ne me souviens de rien. Il paraît qu’un soir je suis sortie du magasin et qu’on m’a retrouvée quatre jours plus tard errant dans la campagne. Il ne m’est rien arrivé de grave, Bobby, je te le promets. C’est pourtant une chose bien étrange que cette impression d’avoir un trou dans sa vie. Mais je ne m’en porte pas plus mal.
J’ai de bonnes nouvelles à t’apprendre. Ce vieux satyre de Bluett est mort d’une embolie. Hartford est prêt à me reprendre si je le désire. Autre chose : tu te souviens de cette histoire extraordinaire du jeune guitariste qui m’avait prêté trois cents dollars, le fameux soir où je me suis sauvée ? Eh bien, il vient de m’envoyer un mot pour me dire qu’il avait fait un héritage de plusieurs millions et que je pouvais garder son argent sans arrière-pensée. Je ne sais vraiment pas quoi faire. On ne sait rien de lui et on ignore même où il est allé.
Il a quitté définitivement la ville. Un de ses voisins m’a dit qu’il, avait deux petites filles ou, plus exactement, qu’il était parti avec deux petites filles. J’ai mis l’argent à la banque. L’héritage de papa est en lieu sûr.
Donc, ne t’en fais surtout pas pour moi. Quant à ces quatre jours, ils n’ont laissé aucune trace en moi, à part un bleu sur une joue. Ce n’est pas trop grave. Quelquefois, en me réveillant, j’ai une drôle d’impression que je n’arrive pas tout à fait à préciser ; il me revient comme un vague souvenir de quelqu’un de très, très bon, que j’aurais beaucoup aimé. Mais c’est peut-être une idée que je me fais. Je sens que tu es en train de te moquer de moi !